Le polypore écailleux, un champignon facile à identifier
Polyporus squamosus se reconnaît aisément, mais sa présence dans le houppier, parfois synonyme de rupture, rend les mesures délicates.
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1. PORTRAIT DU CHAMPIGNON. Le polypore écailleux (Polyporus squamosus) s'installe exclusivement sur les feuillus : érables, marronniers, aulnes, bouleaux, micocouliers, hêtres, frênes, noyers, platanes, peupliers, saules, tilleuls, ormes... et semble épargner les chênes.
Répartition géographique : largement répandu en Europe, il se diffuse plutôt dans les pays nordiques et ne se montre qu'occasionnellement dans les régions du sud de la France. En Asie, en Australie et sur le continent américain, il apparaît plus rarement. Il affectionne particulièrement les milieux ouverts. Les arbres de parcs ou d'alignements sont ses hôtes de prédilection.
Description de la fructification : le chapeau, annuel et de forme arrondie à ovale, mesure de 20 à 50 cm de diamètre pour une épaisseur de 1 à 5 cm. Il est porté par un pied latéral, court (3 à 8 cm de long) mais assez large (2 à 6 cm), plein, de teinte brun clair près des pores et poudré de noir à sa base. La surface piléique est jaunâtre à ocre et recouverte de squames sombres disposées de façon concentrique qui se détachent nettement sur le fond clair. À la face inférieure, les pores plutôt grossiers (1/2 à 1 par mm) ont une forme irrégulière et une teinte crème à jaune pâle. Les tubes blanchâtres assez longs (de 0,5 à 1 cm) sont décurrents le long du pied. La trame blanche et charnue dégage une odeur marquée de farine. La marge est nette, légèrement incurvée et aiguë. La chair coriace revêt une couleur blanche à crème. Le champignon peut fructifier en isolé ou en touffe. La sporée est blanche.
Confusions possibles : le polypore à sclérote (Polyporus tuberaster) présente une morphologie assez proche de celle du polypore écailleux ; sa surface piléique porte comme lui des squames sombres. Cependant, sa console est nettement plus petite (3 à 10 cm de diamètre) et elle est portée par un pied central. De plus, il se rencontre surtout sur des branches mortes dans le houppier d'arbres feuillus ou au sol en forêt sur du bois gisant.
Période de fructification : les sporophores sont visibles toute l'année (d'avril à novembre) à l'exception de la période hivernale. Ils se dessèchent assez rapidement mais ils peuvent persister sur les arbres en l'état pendant plusieurs mois.
Comestibilité : jeunes, les basidiomes du polypore écailleux sont d'assez bons comestibles. Leur chair est légèrement acidulée avec un goût de concombre. Leur consommation doit être rapide après la récolte car ils se raffermissent très vite.
2. CONSÉQUENCES POUR LES ARBRES. C'est à la faveur de blessures survenues sur la partie aérienne des arbres que le polypore écailleux colonise le bois profond. Les grosses plaies d'élagage sont une voie d'accès privilégiée. Puis il se répand dans le cylindre central des branches maîtresses et du tronc. Ce champignon saprophyte d'arbres vivants s'installe rarement sur des sujets morts ou gisants.
Dégradation du bois : la pourriture occasionnée est blanche fibreuse de type « sélective ». Contrairement au Fomes fomentarius qui génère une pourriture blanche de type « simultanée » très « cassante », celle-ci reste spongieuse et fibreuse. Le bois décomposé est fréquemment parcouru de fines lignes noires ; il s'agit de « lignes de démarcation » (pseudosclérotes) séparant différentes souches de polypore écailleux dans le tissu ligneux. Ces structures mycéliennes particulières peuvent également servir d'organes de conservation pour le champignon.
Activité lignivore : elle est assez importante bien que variable selon les essences d'arbres et la situation géographique. Ainsi, la progression de la pourriture est plus rapide chez le tilleul que chez le platane et l'activité du champignon est plus intense dans les régions d'Europe du Nord que dans celles du Sud - où il n'est pas forcément considéré par les arboristes comme un lignivore préoccupant.
Polyporus squamosus se développant à partir d'une plaie importante survenue sur la partie aérienne du sujet, la compartimentation est souvent efficace et limite son extension latérale.
3. DIAGNOSTIC ET PRÉCONISATIONS.Le polypore écailleux fructifie aisément et son identification est facile. Les chapeaux restent visibles pendant toute la saison de végétation et ils se désagrègent lentement. La fructification est donc le moyen privilégié pour mettre en évidence la présence de ce champignon sur un arbre.
Une observation attentive du houppier s'impose car il se développe uniquement dans la partie aérienne. Ses sites préférentiels de fructification sont les anciennes blessures d'arrachement de branches, les plaies de taille ou parfois les enfourchements. Des épaississements et des renflements correspondant à des mécanismes compensateurs mis en place par l'arbre sont parfois visibles sur les troncs et les charpentières infectés.
Décision : dans certaines régions, les ruptures provoquées sur les sujets par le polypore écailleux sont assez courantes ; le champignon est fréquemment mis en évidence en Angleterre lors de casses d'ormes ainsi que d'érables sycomores. En raison de la bonne compartimentation des altérations, il suffit le plus souvent de mesurer précisément, à l'aide d'outils à ondes sonores (Picus® ou Arbotom®) ou d'un pénétromètre (Resistograph®), les épaisseurs de bois sain restant autour de la colonne centrale dégradée. Lorsque la zone altérée concerne un enfourchement, il faut être par contre vigilant car c'est un point de rupture privilégié. Les pourritures occasionnées par le polypore écailleux se situant en hauteur, la mise en oeuvre des mesures est souvent délicate.
Pierre Aversenq
Le champignon peut persister sur l'arbre pendant plusieurs mois. PHOTO : PHILIPPE ROUSSEAU
Le chapeau de forme arrondie à ovale est porté par un pied latéral, court, assez large, plein, de teinte brun clair près des pores et poudré de noir à sa base. PHOTO : PIERRE AVERSENQ
La pourriture occasionnée est blanche fibreuse. PHOTO : PHILIPPE ROUSSEAU
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